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[Critique] The Seasoning House (Paul Hyett, 2012)

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Paris International Fantastic Film Festival 2012 : Hors Compétition.

Le survival, genre devenu en quelques années le fer de lance du cinéma de genre britannique, commence, comme les autres genres, à sérieusement tourner en rond. Et comme un peu de sang neuf ne fait jamais de mal, c’est le prothésiste et expert en maquillages Paul Hyett qui passe à la réalisation pour apporter sa propre vision de l’exercice. Une vision qui tranche brutalement avec les codes, au moins dans un premier temps, et donne lieu à un traitement franchement original, à défaut d’être totalement réussi.

Si le nom de Paul Hyett ne dira pas grand chose à grand monde, il faut savoir que le bonhomme se trouve derrière à peu près tout ce qui peut se faire au niveau prothèses et effets spéciaux de maquillage dans le cinéma anglais depuis 15 ans, du Phare de l’angoisse à Citadel, en passant par The Descent, Eden Lake, Harry Brown, Hunger ou La Dame en noir. Autant dire qu’il en connait un rayon en matière de représentation de la violence en terme de sévices corporels. C’est sans doute la raison pour laquelle il traite la chose avec beaucoup de parcimonie, créant un contrepied total aux attentes et apportant au genre un regard “auteuriste” qui tient plus de la figure de style que d’une réelle ambition de mise en scène. Paul Hyett donne l’illusion de réinventer le genre, esthétisant le glauque de fort belle manière et créant une véritable ambiance, mais seulement pour mieux l’embrasser ensuite et tomber dans ses poncifs les plus grotesques. A croire qu’on ne passe pas du métier de maquilleur à celui de scénariste en un clin d’œil, et ce même s’ils s’y sont mis à quatre plumes.

The Seasoning House 1 [Critique] The Seasoning House (Paul Hyett, 2012)

Les premières minutes de The Seasoning House sont assez merveilleuses. Paul Hyett y établit une charte graphique marquée, avec une photographie jaunâtre très glauque, une succession de travellings avant aux mouvements organiques et aux cadres riches, une mise en scène très aérienne qui n’est pas sans rappeler les instants les plus poseurs du cinéma de Xavier Dolan, avec énormément de ralentis pour créer un effet de suspension. Ça fonctionne d’autant plus que le lieu explorée en accompagnant le personnage d’Angel est purement effroyable, et Paul Hyett parvient à y capter une sorte de beauté sordide assez surprenante. Manque de bol, le procédé tourne rapidement à vide en jouant sur la répétition des gestes du quotidien, le tout intégré à une structure globale faisant la part belle aux flashbacks sur diverses temporalités. Donc si dans le traitement The Seasoning House peut se targuer d’une originalité toutefois très empruntée, le récit en lui-même répond à un cadre très classique. Plusieurs problèmes se posent toutefois. Tout d’abord le fait d’avoir situé le récit dans les Balkans des années 90 en assimilant la totalité des habitants à des bourreaux, voire des monstres. Un parti-pris bourrin qui tranche avec la volonté d’élégance formelle du film. Ensuite la non-utilisation des particularités de l’héroïne dans une optique autre que ponctuelle. Concrètement, Angel est sourde-muette mais à l’exception d’une poignée de séquences, cela ne sert à rien dans la progression dramatique et pire, cela ne se traduit jamais par une affectation réelle du point de vue du spectateur. Paul Hyett crée une héroïne qui n’entend pas mais préfère porter ses efforts sur l’image en oubliant légèrement le son, soit une erreur assez grossière qui maintient toujours une distance bien trop grande entre le spectateur et l’action. Pourtant, si l’artifice du ralenti pour rallonger la durée du film et cacher la misère d’un scénario bien maigre agace, The Seasoning House est loin d’être honteux et propose même quelques séquences d’une brutalité salvatrice. Alors que l’ennui pointe le bout de son nez, la violence entre tout à coup en plein cadre, sans fard.

The Seasoning House 2 [Critique] The Seasoning House (Paul Hyett, 2012)

La violence graphique fait d’ailleurs son apparition assez tôt dans le récit avec une fille égorgée en plein cadre pour donner une leçon aux autres prisonnières. Mais c’est lors de l’assaut d’Angel que Paul Hyett se lâche définitivement, le temps d’une séquence monumentale et d’une sauvagerie qui fait froid dans le dos. Dès lors il est possible de penser que le film va enfin s’élever et intégrer un réel enjeu dramatique, sauf qu’il commence à tomber dans le ridicule. Difficile de retenir un rire moqueur lors de la traque de cette fille aux repères flous par des soldats surentrainés et armés jusqu’aux dents. Et tous les espoirs foutent le camp dès lors que le décor change. Jusqu’à 20 minutes de la fin, The Seasoning House adopte une forme de huis clos à la photographie évolutive, pour ensuite se situer à l’extérieur. Sauf qu’en faisant cela, Paul Hyett atomise ce qui pouvait être légitimement sauvé de son film, tombant dans le survival banal en forêt. Entre incohérences grotesques, situations tenant du cliché pur et simple et mécanique du genre dans ce qu’elle peut avoir de plus médiocre, The Seasoning House s’effondre, en plus d’être tout à coup extrêmement mal torché à grand renfort de plans tout flous, d’une lumière dégueulasse et de shakycam illisible. Dommage, car Paul Hyett semble posséder un réel talent de faiseur d’images, et surtout son actrice principale Rosie Day, 18 ans tout juste, qui livre une prestation éblouissante en se passant de la parole. Dans l’intime comme dans l’action, ce qu’elle donne tient de la performance pure. Si seulement le scénario était à la hauteur…


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